Critique de disque. Symptôme éclatant de l’implantation réussie du reggae sur les terres de France, le groupe Sinsemilia aligne ici une dizaine de chansons que l’on ne peut attribuer à personne d’autre qu’à lui-même. Ce n’est pas le cas de tous les reggaemen œuvrant dans l’Hexagone. Son style s’inspire de la musique jamaïquaine, certes, mais plus des travaux de groupes et chanteurs britanniques comme Aswad, LKJ ou Steel Pulse, ainsi que des rockers qui acclimatèrent le célèbre rythme à leur univers, que du pur roots ou du ragga de Kingston. L’influence de la chanson française est également présente dans le répertoire de cette formation. Chez Sinsemilia, on soigne ses textes : des chroniques sur la vie, ici et maintenant, qui mettent en avant des points de vue aussi pacifiques que radicaux. Guitares acoustiques et électriques, envolées de cuivres et section rythmique tournant rond, se côtoient dans ce disque fait de cavalcades et de ballades.
Debout les yeux ouverts donne à entendre « Tout le bonheur du monde », hymne très entraînant, mais aussi « Simple d’esprit », émouvant chant d’adieu à l’adolescence, ou encore « La Route pour ailleurs », évocation du drame de l’exil que vivent les émigrants. Et plein d’autres choses encore. La sincérité du propos est indéniable. On ne sent pas une once d’opportunisme dans ce groupe d’amis incroyablement unis depuis leurs années de lycée – et même pour certains depuis l’enfance ! Tout a véritablement commencé en 1991, un soir de Fête de la musique, sur les trottoirs de Grenoble. De simples fans de reggae commençaient sans le savoir une brillante carrière… Voilà certainement quelques-unes des raisons pour lesquelles ils obtiennent un succès faramineux, et pas uniquement du côté des « djeunes » qui fument de drôles de cigarettes.
Michel Doussot
Mis en ligne le 24 août 2005 sur routard.com
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