Interview. Excellent rappeur aux textes imagés et poétiques, Oxmo Puccino s’est acoquiné avec les Jazzbastards, alias Vincent Taurelle et Vincent Taeger, des musiciens dont le sens du groove est aussi raffiné qu’implacable. Dans Lipopette Bar, leur concept album à la Gainsbourg, rap et jazz s’allient à merveille.
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Appréciez-vous le jazz depuis longtemps ?
Depuis mon adolescence. D’abord Miles Davis, Billie Holiday, les fanfares New Orleans, puis le latin jazz, la fusion…
Il y a déjà eu des mélanges rap jazz dans les années 1990 avec les projets Buckshot Lefonque de Branford Marsalis ou Jazzmataz de Guru…
Je n’ai pas trop accroché à l’époque, même si c’était le signe d’une ouverture. Peut-être qu’il y avait trop de boucles. À mon avis, ça manquait de profondeur. En revanche, je trouvais que ce que faisaient The Roots en live était à prendre au sérieux.
Comment avez-vous vous-même procédé ?
Au départ, l’idée était de rendre hommage à Billie Holiday en utilisant des phrases musicales piochées dans le catalogue Blue Note. Finalement, Taurelle et Taeger ont trouvé plus excitant de produire une musique inédite et moi de ne pas rester dans le registre biographique. Au fur et à mesure des répétitions, nous avons avancé ensemble : les musiciens créaient des atmosphères par rapport à mes textes tandis que j’écrivais en m’inspirant de leurs compositions. Du coup, j’ai inventé des personnages qu’aurait pu rencontrer Billie et placé mon histoire dans un contexte contemporain.
À l’arrivée, l’ambiance est au polar…
Oui, c’est devenu une histoire comme il s’en déroule pas mal dans Paris, une ville incroyable que je trouve plus intéressante que New York d’ailleurs. Mais je ne suis pas objectif, c’est ma ville !
Comment avez-vous rencontré vos Jazzbastards ?
Dans un premier temps, le projet devait se faire avec Éric Legnini. Comme il était indisponible, je me suis tourné vers Vincent Segal qui m’a mis en contact avec Taurelle et Taeger, deux membres de l’orchestre Sacre du Tympan. J’ai trouvé ça magique, ces journées passées à improviser. Ce processus se poursuit d’ailleurs au cours des répétitions d’avant concert et va continuer sur scène. Il y aura peut-être une suite, mes personnages sont jeunes !
Au fait, le mot Lipopette…
… fait référence à saperlipopette, une expression de surprise fréquente dans les albums de Tintin. Je trouvais qu’elle collait bien à ce que nous avons réalisé avec ce projet.
Propos recueillis par Michel Doussot
Le 4 décembre à l’Élysée Montmartre. 72, boulevard Rochechouart, 18e. Tél. 01 44 92 45 45. À 18h30. À la même affiche : K’naan, sensationnel rappeur somalien installé au Canada. 25 €. Le 15 décembre au Plan. 1, rue Rory Gallagher à Ris-Orangis, 91. Tél. 01 69 43 03 03. À 20h. À la même affiche : Rocé, autre rappeur français qui emprunte les voies du jazz. 16 €. Oxmo Puccino & The Jazzbastards : « Lipopette Bar », cd Blue Note.
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Parution dans le magazine Paris Capitale, novembre 2006.
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